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Désirs d'Avenir 76

A Montpellier, Ségolène Royal appelle à «un dépassement du PS»

20 Septembre 2009 , Rédigé par Yvon GRAIC Publié dans #Ségolène ROYAL

http://www.mediapart.fr/sites/all/themes/mediapart/mediapart/images/mediapart_head.png  Stéphane Alliès

«Aujourd'hui, Ségolène montre qu'elle est beaucoup moins seule que Mitterrand après l'affaire de l'Observatoire ou de Gaulle dans les années 1950. Pour une traversée du désert, ça reste très peuplé.» Avec son sens de la formule, la conseillère Sophie Bouchet-Petersen résume la nouvelle ligne de conduite de Ségolène Royal, qui a ouvert à Montpellier une nouvelle séquence de sa carrière politique.

A l'occasion de la deuxième édition de la fête de la Fraternité, l'ancienne candidate socialiste à la présidentielle a réussi sa démonstration: montrer que si elle compte moins de soutiens chez les cadres du PS, elle conserve son lien particulier avec la base, qui, elle, ne l'abandonne pas. Cette année, pas de Zénith ni de people, mais une ambiance champêtre et bon enfant réunissant plus de 2.000 personnes (dont une bonne part de socialistes locaux et plus de 300 personnes venues du reste de la France). Allure plus classique d'une traditionnelle fête de la Rose, avec intervenants et artistes locaux, stands militants et nourriture maison, et sympathisants venus en curieux. Pour faire décoration, les pancartes de 2007 ont été ressorties. Leur message est toujours valide pour les adhérents: «Demain ne se fera pas sans toi».

Guillaume Garot, porte-parole de Royal, député et maire de Laval, explique le relooking de la saison 2009: «L'an dernier, il s'agissait de faire une démonstration de force numérique et de montrer qu'on pouvait sortir d'une façon classique de faire de la politique. Cette fois-ci, on n'est plus dans le même format, ni dans la même séquence, et on a laissé l'organisation aux locaux, qui ont fait un travail bénévole remarquable. Le chiffre de 5.000 personnes qui était annoncé était sans fondement, sincèrement, je craignais que l'on soit moins que ça.»  

Si la candidate n'attire plus les têtes d'affiche nationales (samedi encore, après les désistements d'Ariane Mnouchkine et Jacques Attali, seuls le poète antillais Daniel Maximin et la documentariste Marie-Monique Robin ont fait le déplacement), elle continue de susciter l'intérêt et les passions. Toujours fervents, les militants de Désirs d'avenir ont conforté Ségolène Royal dans sa détermination. Et de s'exclamer en ouverture de son discours: «Si on reste chevillé à la base et que l'on dit la vérité, tout est possible.»

Contrôle des banques, Victor Hugo et feuille de route

A la tribune, Ségolène Royal a abandonné le stand-up et le prompteur (indisponible), et a divisé son intervention en deux parties: l'une consacrée à l'après-crise financière, l'autre pour donner sa «feuille de route» à son mouvement pour les mois à venir.

En parlant «un langage simple de vérité, que tout le monde peut comprendre», elle a fait trois propositions au G20 qui se profile cette semaine: «encadrer et même interdire les bonus», «mettre fin aux insupportables conflits d'intérêt entre les banques et ceux qui régulent», obliger les établissements bancaires à ne proposer «que des produits solides et simples, et en leur interdisant de spéculer pour leur nom propre, ou alors [...] les laisser seuls et entiers responsables de leurs actes».

Définissant sa vision de la fraternité, Royal a multiplié les citations (Franklin Roosevelt, Yves Coppens, Albert Einstein, Jean Jaurès), jusqu'à citer à deux reprises Victor Hugo: «"Les hommes sont solidaires avec la planète, les planètes avec le soleil, le soleil avec les étoiles, les étoiles avec l'univers. La solidarité des hommes est le corollaire invisible de la solidarité avec l'univers". Si cette phrase était de moi, on m'aurait traité avec commisération et pitié…»

Toujours sur la défensive par rapport à la presse (dont l'évocation provoqua à chaque fois des sifflets dans l'assistance), elle a exhorté ses troupes à la remobilisation: «A vos caméras, à vos stylos, pour rétablir la vérité, sur les faits, contre les manipulations, comme je l'ai fait sur la taxe carbone en brisant le mur du silence.»

Façon chef de parti, elle a tracé les grandes lignes de la mutation de Désirs d'avenir, qu'elle souhaite voir renouer avec son attrait passé: «Il nous faut créer un grand mouvement de citoyens engagés, qui soit basé sur l'action solidaire et l'échange de services. Réactivez Cités d'avenir et Désirs d'entreprendre que vous aviez créés en 2007. Prenez l'initiative d'organiser des assemblées populaires participatives.» Objectif: «accompagner le dépassement du PS».

Si le culte de la personnalité entoure encore Désirs d'avenir, le travail de fond est mis en avant, sous une forme participative et décentralisée. Membre du bureau de Jeunes d'avenir, Grégory Gobron confie: «C'est vrai que ça a pu basculer vers le fan-club il y a quelque temps, mais on a su revenir à l'essentiel l'année dernière, avec les universités populaires. Mais vous savez, ce n'est pas parce qu'il y a de la ferveur, qu'on prend Ségolène pour Dieu. La combinaison entre la rhétorique et l'incarnation de cet espoir dans un leader, ça a très bien marché à droite…» Même si, comme le rappellent de nombreux militants, Désirs d'avenir n'est pas aussi riche que l'UMP.

«Economie de moyens assumée»

Désormais, le dénuement financier n'est plus démenti *. Il devient même une marque de transparence et de sincérité. Une «économie de moyens assumée», dit Guillaume Garot. Même les péripéties du site internet sont reconnues et dédramatisées.

«On s'est clairement planté avec ce site, raconte Sophie Bouchet-Petersen. Au moins on a pu se marrer en voyant les parodies à hurler de rire de la blogosphère. Mais sur le fond, c'est quand même le type de site qu'on veut, simple, maniable et accessible à tous, qui ne soit pas réservé aux geeks. Evidemment en plus joli et qui fonctionne. Mais il faut relativiser ces histoires d'internet, qui ne concerne pas grand-monde. Mardi soir quand elle a parlé sur TF1, il y avait huit millions de personnes.»

Le discours contre les élites trouve un certain écho dans les allées du parc municipal de Grammont. Contre le «"Ségo-bashing" reposant sur le même logiciel "seule, fofolle, imprévisible" et alimenté par un microcosme médiatico-politique de 300 pelés qui tournent en boucle sur trois arrondissements parisiens», selon les termes de la conseillère de la présidente de Poitou-Charentes. Bouchet-Petersen revendique l'humilité financière: «Comme au conseil régional, Ségolène a une vision de l'économie domestique appliquée à la politique. Nous ne sommes pas un appareil stalinoïde, nous ne sommes pas riches, nous ne promettons pas des places. Désirs d'avenir, c'est du volontariat et du feeling, avec les moyens du bord, et sans rembourser les frais.»

Les rapports au PS et à sa cuisine interne n'étaient volontairement pas au programme de la journée. Aucune allusion (ou alors très cachée) à la tribune, un désir manifeste de minimisation en coulisses. Au terme d'une semaine marquée par le retour des polémiques autour des fraudes du dernier congrès, l'heure semble à l'apaisement. Ainsi que le synthétise Guillaume Garot, «le message est passé et a bien été reçu par les militants. Stop aux tricheries. Ségolène a dit ce qu'elle avait à dire. Maintenant, nous ne sommes pas des irresponsables, et si la direction du PS ne réagit pas davantage, nous dirons: "Dont acte"».

Signe de sa volonté de se tourner vers l'avenir plutôt que dans les rouages socialistes, Royal a pris soin de ne pas trop en faire aux côtés de Georges Frêche, président du conseil régional Languedoc-Roussillon exclu du PS mais venu l'accueillir chaleureusement à la gare de Montpellier. Si elle a refusé son invitation à déjeuner, elle s'est entretenu avec son lieutenant Robert Navarro, premier fédéral de la puissante fédération de l'Hérault.

«Il n'y a aucun message adressé au PS local cet après-midi», précise-t-on dans son entourage, qui est resté à distance de la primaire régionale du 1er octobre prochain, où les deux candidats locaux en concurrence (l'un frêchiste, l'autre non) font partie de ses soutiens. L'ancienne motion E du dernier congrès de Reims est aujourd'hui éparpillée façon puzzle socialiste, mais Royal n'entend pas s'y investir davantage.

Quant à ceux qui l'ont délaissée, comme Vincent Peillon ou Manuel Valls, là encore, tout est question de relativité. «On ne fait pas un drame de voir certains défendre les mêmes idées que nous en parallèle, rétorque une Bouchet-Petersen sereine. Mais quand le vent de la victoire flottera à nouveau dans l'air, ils seront nombreux à revenir le humer. Comme d'habitude.» De son côté, Guillaume Garot philosophe: «Pour l'heure, Vincent et Manuel affirment une franche indépendance, mais la politique, ça va, ça vient, il y a des flux et des reflux…»

Dernier poids lourd à faire partie de son premier cercle, l'ancien porte-parole de l'Elysée mitterrandien Jean-Louis Bianco se veut confiant. Enchanté par «un très grand discours, qui renouvelle les formes classiques du message politique, peut-être plus sobre que les grands orateurs à la Fabius, Hollande ou Mélenchon, mais ayant plus de chances d'être de nouveau entendu des Français», il estime que la reprise en main est opérée. «En reprenant la présidence de Désirs d'avenir, Ségolène veut relancer une base qu'elle seule peut mobiliser en si grand nombre, dit Bianco. Désormais, il nous faut être un lieu d'avant-garde décentralisée.»

Toutefois, aucun calendrier concernant Désirs d'avenir n'a pour l'instant été imaginé, Royal misant sur la prise d'initiative et l'autogestion de ses soutiens locaux. Car s'ouvre pour elle une période décisive, celle de la campagne des élections régionales, qui doit confirmer dans les urnes picto-charentaises sa popularité éprouvée à Montpellier.

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Aujourd'hui  Bergé propose son aide à Royal pour son site web

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