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Désirs d'Avenir 76

Ségolène Royal «Réformer la France, réformer l'Europe» - Club Suisse de la Presse

29 Août 2013 , Rédigé par DA 76

Ségolène Royal «Réformer la France, réformer l'Europe» - Club Suisse de la Presse

Interview de Ségolène Royal

Par Luisa Ballin

Ségolène Royal, Présidente de la région Poitou-Charentes, est cette année l’invitée d’honneur de la Fête de la Communication au Club suisse de la presse à Genève. Celle qui fut ministre dans les gouvernements de Pierre Bérégovoy et de Lionel Jospin et première femme à accéder au second tour de l’élection présidentielle française en 2007, a reçu Luisa Ballin dans son fief de Poitiers, à la veille de son retour sur le devant de la scène politique, lors de l’université d’été du Parti socialiste français à La Rochelle. Entretien autour d’un livre, d’un engagement et d’une vision de l’Europe.

Madame la Présidente, peut-on changer les choses en n’étant plus ni au Gouvernement ni au Parlement ?
Comme disait Roosevelt et comme je l’écris dans mon livre, il faut faire les choses là où l’on est avec les moyens que l’on a. La gestion d’un territoire régional est très importante car elle permet de mettre en application les discours et les actes sur des sujets aussi importants que l’excellence environnementale et climatique, thématique sur laquelle j’ai été élue en 2004 et qui a anticipé les politiques nationales qui sont venues ensuite. Je considère la région que je préside comme un laboratoire dans lequel je peux expérimenter les modes d’actions politiques auxquels je crois, dans le domaine économique, écologique, culturel, social et démocratique. J’ai aussi des responsabilités internationales : je suis Vice-Présidente de l’Internationale socialiste, Présidente de l’Association internationale des régions francophones et Vice-Présidente de la Banque publique d’investissement, une de mes propositions politiques que j’ai le plaisir de voir être mise en application et à la réussite de laquelle je participe.

Vous êtes toujours sollicitée sur le plan national, notamment par les médias. Seriez-vous intéressée par un mandat ou une mission sur le plan international, comme l’a été votre amie Michelle Bachelet, l’ancienne Présidente du Chili, qui après avoir dirigé l’agence ONU Femme sera sans doute à nouveau candidate à l’élection présidentielle de son pays?
J’évite d’être candidate à quoi que ce soit. J’essaie de bien faire les choses là où je suis. Je continue en effet d’être écoutée et entendue et c’est ce qui importe. J’ai une cohérence politique qui continue à faire écho. J’ai ouvert des chemins et proposé des idées neuves qui se sont concrétisées et auxquelles je crois.

Dans votre livre « Cette belle idée du courage » (paru chez Grasset), en écho à votre parcours et à votre expérience, vous laissez percer des envies. Ce livre est-il une nouvelle étape pour aller au bout de vos rêves ?
Oui. Ce livre m’a permis de faire le récit d’événements auxquels j’ai participé et que je n’avais jamais écrit. Ce livre remet à niveau une densité politique sur la base d’une idée du courage. Je l’ai écrit après avoir observé des cheminements qui ont soutenu mon engagement politique.

Qu’est-ce que la politique pour vous ?
Je crois que la politique c’est d’être au service du plus grand nombre. Les énergies que j’ai trouvées dans les personnages que je décris, j’ai voulu les mettre à disposition du plus grand nombre. Ce qui me fait le plus plaisir ce sont les lettres que je reçois, les messages de toutes ces personnes qui me disent avoir retrouvé le courage à la lecture de ce livre.

Précisément, juste après le poème de Rudyard Kipling, vous citez Paulo Coelho et sa phrase : « Un guerrier sait bien qu’une guerre est faite de plusieurs batailles : il poursuit ». Vous allez donc poursuivre ?
En tous les cas je n’arrête pas ! Je poursuis tranquillement ma route. Je ne suis pas en manque de je ne sais quoi. C’est ce qui fait ma liberté et ma force. Je suis là. Si l’histoire doit repasser, elle repassera.

Et au fond de vous, vous avez la conviction que l’histoire repassera…
L’histoire est faite de tant de choses : ce sont des circonstances et une époque. Je ne suis pas en attente, je vis bien les choses que je fais en ce moment.

Vous avez dit et écrit : j’ai été à nouveau candidate parce que je ne voulais pas que l’on dise que je n’étais qu’un accident de l’histoire.
Oui. Je sentais bien que c’était difficile, mais je n’avais pas le choix. Il fallait que j’y retourne. D’ailleurs certains me poussaient à faire une annonce plus tôt dans ma région. Lorsque j’ai été réélue ici, dans ma région, avec 61% des voix, tout candidat qui comme moi avait tenté de conquérir la présidentielle aurait immédiatement dit : je repars !

Que dites-vous à ce moment-là ?
Je me protège, parce que je me dis que si je dois vivre pendant deux ans en état de candidate à la présidentielle, je vais devoir affronter tous ceux qui vont sortir leurs griffes. Je me protège et je dis : on verra. Alors que dans la dynamique politique il faut s’exprimer, il ne faut pas se protéger. Je ne dis pas cela pour refaire l’histoire, mais je ne voulais pas que l’on dise que ma présence au deuxième tour de l’élection présidentielle était un accident de l’histoire, une personne surgie de nulle part, un produit des sondages, un personnage secondaire de la vie politique et autres amabilités que j’ai entendues, y compris de la part de certains socialistes. Je ne pouvais pas arrêter. Cela m’a encouragée à rester, même si je savais que ce serait difficile et que les choses ne se déroulaient pas comme je l’avais voulu.

Comment l’expliquez-vous ? Etait-ce trop tôt d’avoir une femme au second tour de l’élection présidentielle en France?
C’est difficile à dire, mais si j’avais été un homme je n’aurais pas eu la majorité de l’appareil de mon parti contre moi. Et puis il y avait ce procès en incompétence que l’on faisait en permanence contre les femmes, qui a cessé depuis et qui a fait que les choses se sont retournées. En tant que femme, c’était plus dur d’ouvrir le chemin. Aux Etats-Unis, l’élection de Barak Obama a été une transgression extraordinaire. Peut-être que si Barak Obama avait été élu avant moi, la transgression de voter pour une femme en France aurait fait bouger les lignes.

En pensant à vous et à Hilary Clinton, on peut se demander si ce n’est pas un handicap ou en tout les cas une difficulté supplémentaire que d’être à la fois une femme politique de haut niveau et l’épouse ou la compagne d’un homme politique qui est au plus haut niveau ?
Non, parce que l’on partage beaucoup de choses et on comprend les contraintes. C’est plutôt un atout…

Dans votre livre, vous citez l’ancien Président du Brésil Lula, en soulignant le fait qu’il a persévéré à quatre reprises pour être élu, qu’il a analysé ce qui n’a pas marché et qu’il a beaucoup appris de ses erreurs jusqu’à la victoire. Et, vous, avez-vous fait des erreurs ?
Bien sûr et on apprend beaucoup de ses erreurs, notamment sur l’organisation d’une campagne. Si j’avais eu plus de soutien, ma capacité d’organisation en aurait été multipliée. Du moins cela a été utile pour la suite car le candidat socialiste de 2012, François Hollande en a fait l’analyse. Tout cela a été décrypté et a servi pour la victoire de 2012, et c’est tant mieux.

A Genève, votre intervention sera centrée sur le thème : « Réformer la France, réformer l’Europe ». Que faire pour réformer l’Europe qui est dans une impasse et pour réformer la France qui vit une période difficile ? Que manque-t-il à l’Europe et à la France ?
Il manque un désir d’avenir, une lisibilité de l’avenir et une espérance. C’est cela qu’il faut construire pour que les peuples d’Europe, dans leur diversité, se tournent collectivement vers un horizon commun. Il faut que cela soit encouragé, porté, fédéré, sur des thèmes comme l’écologie, l’énergie, l’esprit d’entreprendre, l’emploi, les biotechnologies et aussi sur la diversité, la culture et la jeunesse. Mais je vous en dirai plus lors de mon intervention !

La Suisse et la France traversent un moment difficile, sur le plan économique notamment. Comment faire pour que les relations entre nos deux pays soient moins tendues ?
Peut-être faut-il des projets culturels communs. Les peuples se comprennent mieux lorsqu’ils ont des projets communs qui les élèvent.

Et par rapport aux divergences en matière de fiscalité ?
Un rapprochement entre les deux pays peut se faire par l’esprit d’entreprendre.

Ségolène Royal prendra la parole au Club suisse de la presse, pour une intervention intitulée : « Réformer la France, Réformer l’Europe ». Villa La Pastorale, 106, route de Ferney, 1202 Genève. Jeudi 29 août à 16h30, dans le cadre de la Fête de la Communication.

Cet entretien sera également publié dans l’édition du 12 septembre 2013 du bimensuel suisse La Cité : www.lacite.info

Interview de Ségolène Royal
Par Luisa Ballin

Ségolène Royal, Présidente de la région Poitou-Charentes, est cette année l’invitée d’honneur de la Fête de la Communication au Club suisse de la presse à Genève. Celle qui fut ministre dans les gouvernements de Pierre Bérégovoy et de Lionel Jospin et première femme à accéder au second tour de l’élection présidentielle française en 2007, a reçu Luisa Ballin dans son fief de Poitiers, à la veille de son retour sur le devant de la scène politique, lors de l’université d’été du Parti socialiste français à La Rochelle. Entretien autour d’un livre, d’un engagement et d’une vision de l’Europe.

Madame la Présidente, peut-on changer les choses en n’étant plus ni au Gouvernement ni au Parlement ?
Comme disait Roosevelt et comme je l’écris dans mon livre, il faut faire les choses là où l’on est avec les moyens que l’on a. La gestion d’un territoire régional est très importante car elle permet de mettre en application les discours et les actes sur des sujets aussi importants que l’excellence environnementale et climatique, thématique sur laquelle j’ai été élue en 2004 et qui a anticipé les politiques nationales qui sont venues ensuite. Je considère la région que je préside comme un laboratoire dans lequel je peux expérimenter les modes d’actions politiques auxquels je crois, dans le domaine économique, écologique, culturel, social et démocratique. J’ai aussi des responsabilités internationales : je suis Vice-Présidente de l’Internationale socialiste, Présidente de l’Association internationale des régions francophones et Vice-Présidente de la Banque publique d’investissement, une de mes propositions politiques que j’ai le plaisir de voir être mise en application et à la réussite de laquelle je participe.

Vous êtes toujours sollicitée sur le plan national, notamment par les médias. Seriez-vous intéressée par un mandat ou une mission sur le plan international, comme l’a été votre amie Michelle Bachelet, l’ancienne Présidente du Chili, qui après avoir dirigé l’agence ONU Femme sera sans doute à nouveau candidate à l’élection présidentielle de son pays?
J’évite d’être candidate à quoi que ce soit. J’essaie de bien faire les choses là où je suis. Je continue en effet d’être écoutée et entendue et c’est ce qui importe. J’ai une cohérence politique qui continue à faire écho. J’ai ouvert des chemins et proposé des idées neuves qui se sont concrétisées et auxquelles je crois.

Dans votre livre « Cette belle idée du courage » (paru chez Grasset), en écho à votre parcours et à votre expérience, vous laissez percer des envies. Ce livre est-il une nouvelle étape pour aller au bout de vos rêves ?
Oui. Ce livre m’a permis de faire le récit d’événements auxquels j’ai participé et que je n’avais jamais écrit. Ce livre remet à niveau une densité politique sur la base d’une idée du courage. Je l’ai écrit après avoir observé des cheminements qui ont soutenu mon engagement politique.

Qu’est-ce que la politique pour vous ?
Je crois que la politique c’est d’être au service du plus grand nombre. Les énergies que j’ai trouvées dans les personnages que je décris, j’ai voulu les mettre à disposition du plus grand nombre. Ce qui me fait le plus plaisir ce sont les lettres que je reçois, les messages de toutes ces personnes qui me disent avoir retrouvé le courage à la lecture de ce livre.

Précisément, juste après le poème de Rudyard Kipling, vous citez Paulo Coelho et sa phrase : « Un guerrier sait bien qu’une guerre est faite de plusieurs batailles : il poursuit ». Vous allez donc poursuivre ?
En tous les cas je n’arrête pas ! Je poursuis tranquillement ma route. Je ne suis pas en manque de je ne sais quoi. C’est ce qui fait ma liberté et ma force. Je suis là. Si l’histoire doit repasser, elle repassera.

Et au fond de vous, vous avez la conviction que l’histoire repassera…
L’histoire est faite de tant de choses : ce sont des circonstances et une époque. Je ne suis pas en attente, je vis bien les choses que je fais en ce moment.

Vous avez dit et écrit : j’ai été à nouveau candidate parce que je ne voulais pas que l’on dise que je n’étais qu’un accident de l’histoire.
Oui. Je sentais bien que c’était difficile, mais je n’avais pas le choix. Il fallait que j’y retourne. D’ailleurs certains me poussaient à faire une annonce plus tôt dans ma région. Lorsque j’ai été réélue ici, dans ma région, avec 61% des voix, tout candidat qui comme moi avait tenté de conquérir la présidentielle aurait immédiatement dit : je repars !

Que dites-vous à ce moment-là ?
Je me protège, parce que je me dis que si je dois vivre pendant deux ans en état de candidate à la présidentielle, je vais devoir affronter tous ceux qui vont sortir leurs griffes. Je me protège et je dis : on verra. Alors que dans la dynamique politique il faut s’exprimer, il ne faut pas se protéger. Je ne dis pas cela pour refaire l’histoire, mais je ne voulais pas que l’on dise que ma présence au deuxième tour de l’élection présidentielle était un accident de l’histoire, une personne surgie de nulle part, un produit des sondages, un personnage secondaire de la vie politique et autres amabilités que j’ai entendues, y compris de la part de certains socialistes. Je ne pouvais pas arrêter. Cela m’a encouragée à rester, même si je savais que ce serait difficile et que les choses ne se déroulaient pas comme je l’avais voulu.

Comment l’expliquez-vous ? Etait-ce trop tôt d’avoir une femme au second tour de l’élection présidentielle en France?
C’est difficile à dire, mais si j’avais été un homme je n’aurais pas eu la majorité de l’appareil de mon parti contre moi. Et puis il y avait ce procès en incompétence que l’on faisait en permanence contre les femmes, qui a cessé depuis et qui a fait que les choses se sont retournées. En tant que femme, c’était plus dur d’ouvrir le chemin. Aux Etats-Unis, l’élection de Barak Obama a été une transgression extraordinaire. Peut-être que si Barak Obama avait été élu avant moi, la transgression de voter pour une femme en France aurait fait bouger les lignes.

En pensant à vous et à Hilary Clinton, on peut se demander si ce n’est pas un handicap ou en tout les cas une difficulté supplémentaire que d’être à la fois une femme politique de haut niveau et l’épouse ou la compagne d’un homme politique qui est au plus haut niveau ?
Non, parce que l’on partage beaucoup de choses et on comprend les contraintes. C’est plutôt un atout…

Dans votre livre, vous citez l’ancien Président du Brésil Lula, en soulignant le fait qu’il a persévéré à quatre reprises pour être élu, qu’il a analysé ce qui n’a pas marché et qu’il a beaucoup appris de ses erreurs jusqu’à la victoire. Et, vous, avez-vous fait des erreurs ?
Bien sûr et on apprend beaucoup de ses erreurs, notamment sur l’organisation d’une campagne. Si j’avais eu plus de soutien, ma capacité d’organisation en aurait été multipliée. Du moins cela a été utile pour la suite car le candidat socialiste de 2012, François Hollande en a fait l’analyse. Tout cela a été décrypté et a servi pour la victoire de 2012, et c’est tant mieux.

A Genève, votre intervention sera centrée sur le thème : « Réformer la France, réformer l’Europe ». Que faire pour réformer l’Europe qui est dans une impasse et pour réformer la France qui vit une période difficile ? Que manque-t-il à l’Europe et à la France ?
Il manque un désir d’avenir, une lisibilité de l’avenir et une espérance. C’est cela qu’il faut construire pour que les peuples d’Europe, dans leur diversité, se tournent collectivement vers un horizon commun. Il faut que cela soit encouragé, porté, fédéré, sur des thèmes comme l’écologie, l’énergie, l’esprit d’entreprendre, l’emploi, les biotechnologies et aussi sur la diversité, la culture et la jeunesse. Mais je vous en dirai plus lors de mon intervention !

La Suisse et la France traversent un moment difficile, sur le plan économique notamment. Comment faire pour que les relations entre nos deux pays soient moins tendues ?
Peut-être faut-il des projets culturels communs. Les peuples se comprennent mieux lorsqu’ils ont des projets communs qui les élèvent.

Et par rapport aux divergences en matière de fiscalité ?
Un rapprochement entre les deux pays peut se faire par l’esprit d’entreprendre.

Ségolène Royal prendra la parole au Club suisse de la presse, pour une intervention intitulée : « Réformer la France, Réformer l’Europe ». Villa La Pastorale, 106, route de Ferney, 1202 Genève. Jeudi 29 août à 16h30, dans le cadre de la Fête de la Communication.

Cet entretien sera également publié dans l’édition du 12 septembre 2013 du bimensuel suisse La Cité : www.lacite.info

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