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Désirs d'Avenir 76

Collectivités: «Que l’Etat rembourse d'abord ce qu'il nous doit»

20 Mai 2010 , Rédigé par Yvon GRAIC Publié dans #Territoire

Trois questions à

Claudy Lebreton, à la tête de l'Association des départements de France et président (PS) des Côtes d'Armor, revient sur le gel des dotations aux collectivités locales, annoncé par Nicolas Sarkozy.

Recueilli par LAURE EQUY

Claudy Lebreton (PS), président de l'assemblée des départements de France, le 14 septembre 2006

© AFP Alain Julien

Pain sec à tous les étages. Dans sa volonté de réduire la dépense publique, Nicolas Sarkozy n’a pas oublié les collectivités locales. A l’issue de la deuxième session de la conférence sur les déficits, le président de la République vient d’annoncer, entre autres, le gel «en valeur» des dotations de l’Etat aux collectivités, les appelant notamment à la «responsabilisation collective».

Il souhaite ainsi que ces dotations soient «modulées selon des critères de bonne gestion pour encourager les collectivités locales à réduire leurs dépenses dans les mêmes proportions que l’Etat». Un discours qui passe très mal auprès, notamment, des régions et des départements, majoritairement dirigés par la gauche: les représentants de leurs assemblées - ARF et ADF - ont d’ailleurs boycotté la réunion de ce jeudi à l’Elysée.

Président de l’Assemblée des départements de France, le socialiste Claudy Lebreton, invoque, pour justifier sa chaise vide, le fait que «les départements ne sont pas responsables du déficit public de l’Etat». Rappelant «la situation dramatique» des départements, du fait de l’explosion des dépenses liées aux aides sociales transférées mais non compensées intégralement par l’Etat, il revient sur les annonces du chef de l’Etat.

Nicolas Sarkozy a annoncé le gel des dotations de l’Etat aux collectivités, comme le proposait Gilles Carrez (UMP). Quelle est votre réaction?

Cette annonce intervient alors que la situation des départements est dramatique. Nous sommes prêts à ouvrir le débat, sur des mesures de moyen terme, sur la question de la dépendance, sur une péréquation entre collectivités riches et pauvres. Mais il y a un préalable: que l’Etat rembourse ce qu’il nous doit. Pour les charges qu’il nous a transférées (Allocation personnalisée d’autonomie, Prestation de compensation des personnes handicapées et RMI devenu Revenu de solidarité active, ndlr), sans les compenser à l’euro près, l’Etat doit aux département 4,65 milliards d’euros pour la seule année 2009. Sur le reste de nos politiques, nous sommes prêts à un pacte fiscal et financier. Mais en attendant, nos dépenses sociales explosent et sans évolution, dans trois ans, il n’y aura plus de départements.

Sur le diagnostic, Gilles Carrez (co-président du groupe de travail sur la maîtrise des dépenses locales, ndlr) a plutôt raison, il a été honnête et objectif. Mais ses propositions ne répondent pas aux causes structurelles de financement des départements.

Pourquoi avoir décidé, de nouveau, de boycotter cette conférence sur les déficits publics?

Je suis cohérent puisque je n’étais déjà pas venu à la première conférence ! Les raisons n’ont pas changé: les départements ne sont pas responsables du déficit public de l’Etat. Les conseils généraux n’ont pas droit au déficit et s’ils votent un budget en déséquilibre, il est déféré à la chambre régionale des comptes. Nous sommes donc de biens meilleurs gestionnaires que l’Etat. Il ne faut pas venir nous faire la leçon! Et, encore une fois, l’Etat nous doit tellement d’argent que nous participons déjà largement à l’effort de solidarité nationale.

Le Président veut, par ailleurs, changer la Constitution pour imposer «à chaque gouvernement issu des urnes de s’engager pour cinq ans sur une trajectoire de déficit». Que vous inspire cette réforme ?

Je sais que les Allemands l’ont fait l’an dernier. C’est bien mais cela va complètement lier les mains de tout gouvernement et entraver les libertés de ceux qui arriveraient aux responsabilités en cas d’alternance. Et puis, il ne faut pas jouer à se faire peur, la France n’est pas dans la situation de la Grèce. La situation est grave mais il y a des solutions: on aborde toujours la question des dépenses sans jamais parler des recettes. Mais certains choix de ce gouvernement ont été mauvais, comme la TVA à 5,5% dans la restauration et le bouclier fiscal. On nous demande d’économiser mais l’Etat lui-même n’est pas vertueux dans ses choix politiques.

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